L'infatigable skieur et himalayiste polonais n'ambitionne ni plus ni moins que de réaliser la première descente à skis intégrale du K2. Explications.
Vous avez peut-être entendu parler de lui lors de son dernier exploit. Pendant l'été dernier, Andrzej Bargiel a gravi et skié les 5 sommets de plus de 7000m de l'ex-URSS en moins de 30 jours. Ce natif du massif des Tatras est devenu un mordu de la haute-altitude, après un passé de compétiteur en ski-alpinisme. De ce passé, il a gardé un goût prononcé pour le light&fast et des habitudes d'entrainement rigoureuses. Pour en savoir plus sur ce drôle de personnage vous pouvez retrouver son portrait que nous avions brossé dans le magazine Vertical #61.
Après avoir skié le Shishapangma (8013 m), le Manaslu (8156 m) et le Broad Peak (8051 m), le polonais de 29 ans veut maintenant s'attaquer au K2, considéré par beaucoup comme le plus exigeant de tous les 8000 et encore jamais skié intégralement.
35 ans après la première descente intégrale d'un 8000 à skis (Sylvain Saudan au Gasherbrum I), Andrzej Bargiel admet que cette expédition est la plus difficile et ambitieuse qu'il ait jamais menée. Avant de prendre l'avion pour le Pakistan, il s'est entrainé plusieurs semaines à Chamonix où il a coché quelques classiques comme le Mallory ou le Gervasutti au Tacul.
L'idée de skier le K2 n'est pas nouvelle. En 2001, le grand tyrolien Hans Kammerlander a chaussé les skis au sommet, mais a remis les crampons au bout 400m de D- après avoir assisté à la chute fatale d'un coréen. Au sujet de la descente intégrale du K2, il déclare à son retour : "Quelqu'un le fera, mais il aura besoin de beaucoup de talent et d'énormément de chance. J'ai 44 ans, trop vieux pour essayer à nouveau. Je laisse ce rêve à la jeune génération".
En 2009 l'américain David Watson a chaussé à 8350m, sans atteindre le sommet -personne n'y arrivera cette année là. Il devient toutefois le premier homme à skier le fameux et terrifiant bottleneck, cette étroiture raide et habituellement en glace dominée par un grand sérac, dont l'enneigement fut cette fois-ci permis par la mauvaise météo. "La descente à skis était certes très exigeante, mais grimper jusque là-haut était bien plus rude. Le K2 est vraiment un sommet difficile". Sur l'épaule du K2, il profite de la grosse poudreuse laissée par les perturbations "les meilleurs virages de l'expé". Il continue sa descente en suivant la ligne de la voie normale de montée, par l'éperon des Abruzzes. Celui-ci étant majoritairement rocheux, il n'est pas skiable intégralement et David Watson effectue des rappels.
Pour valider la descente intégrale, Andrzej Bargiel prévoit d'emprunter une autre voie, comme par exemple la ligne de l'allemand Luis Stitzinger qui a skié sans interruption de 8050m à 5100m. Ci-dessous la ligne envisagée :
Il se pourrait qu'Andrzej Bargiel fasse équipe sur place avec le slovène Davo Karnicar, de 26 ans son aîné, et qui partage la même ambition. Très expérimenté, ce dernier a notamment réalisé la première descente intégrale de l'Annapurna (1995) et de l'Everest (2000). Le voici ci-dessous au pied des Gasherbrum I & II en 2015.
Andrzej Bargiel et son équipe se trouvent actuellement au camp de base du K2, sur le glacier du Baltoro, où ils ont dressé le drapeau polonais. Il est possible de suivre leur progression en temps réel grâce à leur balise GPS.
Débarqués avec drones et appareils photos, l'équipe d'Andrzej Bargiel maîtrise la communication. Andrzej est une star en Pologne ! Ils ont prévu de documenter leur expédition au moyen d'une web-série dont voici le premier épisode.
Le petit monde de l'himalayisme et du ski de pente raide a désormais les yeux tournés vers le Karakoram...
Mise à jour du 06/07/17 : Davo Karnicar a stoppé son expédition du fait d'une blessure au dos ainsi que des conditions jugées mauvaises sur le K2. Andrzej Bargiel a fait un premier aller-retour au C1 avec quelques virages à la clef.